30/05/2014
Le Trink-Hall du parc d'Avroy
Dès 1880, le parc d’Avroy se voit doter d’un trink-hall (parfois orthographié « trinck-hall », mots d’origine germanique désignant au départ une salle de dégustation dans une station thermale). Il s’agit d’un café de style mauresque, décoré d’arabesques et flanqué de deux coupoles cuivrées. Le bâtiment correspond aux goûts de la clientèle bourgeoise de l’époque, qui apprécie ce dépaysement à l’orientale.
Cette carte postale colorisée présente le parc d'Avroy et l'avenue Rogier à la fin du XIXe siècle. La flèche permet de repérer les coupoles du Trink-Hall.
Carte postale de 1896.
Le parc d'Avroy à la fin du XIXe siècle, avec le Trink-Hall et le monument équestre de Charlemagne (œuvre du statuaire Louis Jehotte), installé là depuis 1868. Ce dessin provient de la revue « Si Liège m’était conté », revue trimestrielle publiée par les autorités communales dans les années 1960 et 70.
Cette carte postale de la fin du XIXème siècle nous montre, à l’arrière de la balustrade des Terrasses et de l’avenue Rogier, le parc d’Avroy dont la végétation naissante ne masque ni le Trink-Hall mauresque ni l’église du Saint-Sacrement.
Ci-dessus, le Trink-Hall en 1887. Ci-dessous, en 1890 :
Remarquez l'inscription sous la coupole de gauche. La grande salle, en effet (photo suivante), éclairée par de hautes verrières, comporte huit billards pour accueillir les amateurs du genre :
Ci-dessus, la promenade d'Avroy à l'aube du XXe siècle. Ci-dessous, à titre de comparaison, le même endroit en 2006 :
Très vite, un kiosque à musique est érigé dans le parc, près de la façade arrière du Trink-Hall. Le décor est idéal pour assurer le confort des auditeurs qui viennent écouter les concerts organisés par la Ville. Ce nouvel édicule, aux colonnes en fonte gracieusement inclinées vers l’extérieur, finira par détrôner son prédécesseur établi depuis 1852 à la hauteur de la rue Darchis.
Ci-dessus vers 1900. Ci-dessous en 2006 :
Le Trink-Hall est voué à la gastronomie, mais aussi aux divertissements. Depuis 1885, y ont lieu des séances de cinématographie (les premières à Liège, paraît-il).
Le local de cinématographie est victime d'un incendie en 1908, et le sinistre endommage d'autres parties du bâtiment, ce qui nécessite des travaux de restauration en 1910.
Cette photo datant de 1908 est répertoriée aux archives du Vieux-Liège comme « le Trink-Hall après l'incendie de 1908 », mais je m’avoue incapable de reconnaître de quelle partie du bâtiment il s'agit !
Les travaux de restauration de 1910, effectués par la firme Herzé et frère. Le bâtiment est alors « mis provisoirement à la disposition du syndicat d'initiative du pays de Liège, de la société des Amis du Vieux-Liège et des groupes de boys-scouts » (dixit Gobert).
Dès 1914, le Trink-Hall est utilisé comme bureau de ravitaillement. En 1918, il subit de nouvelles dégradations quand les Allemands, à des fins militaires, font arracher les éléments métalliques de sa toiture.
À propos de la guerre, la tradition veut que la batterie d’obusiers installée en Avroy par les Allemands, en août 1914, était du type « Grosse Bertha » de 420 mm (un arbre entouré de chaînes rappelle cet emplacement). L’objectif de ces canons géants : frapper les forts de Flémalle et Hollogne. Cependant, les spécialistes militaires opteraient plutôt de nos jours pour des engins de 305, plus légers et plus facilement transportables depuis la gare des Guillemins où ils sont arrivés par rails.
Le sort s’acharne sur le Trink-Hall. Il a certes recouvré dès 1921 les parures cuivrées de sa célèbre toiture, mais après les inondations catastrophiques de l’hiver 1925-1926, il ne retrouvera jamais son prestige d'antan. Le bâtiment va se délabrer au fil du temps et atteindre un tel niveau de vétusté que les autorités communales, en 1961, décident sa démolition parce qu’il « dépare incontestablement un des coins les plus agréables de la ville ».
Pendant les inondations de l'hiver 1925-1926.
Les quatre photos qui suivent ont été prises en mai 1962 et témoignent de l'abandon des lieux à cette époque :
Maquette du nouveau Trink-Hall qui sera construit en 1963 (© Bureau d’Études Age-Satin). « Souhaitons à ce nouveau-né de l’architecture moderne (dit un texte d’époque) de rendre à ce coin pittoresque et reposant toute sa popularité d’antan ». L’établissement redevient un endroit chic, où l’on organise des mariages, soirées dansantes et réunions d’affaires. Avec l’obligation que le café du rez-de-chaussée et les terrasses soient librement accessibles aux promeneurs du parc.
Le Trink-Hall au début des années 1970. Sous la frondaison, à droite, on distingue l’escalier du kiosque à musique modernisé la décennie précédente. C’est cet escalier que l’on retrouve sur la photo ci-dessous, prise le 1er mai 1968 (année de contestation notoire). Dès l’origine, le kiosque a servi de point de ralliement pour le cortège du parti socialiste le jour de la fête des travailleurs :
Depuis 1982, le bâtiment abrite le Musée d’Art Différencié (MAD), géré par le CREAHM (Créativité et Handicap Mental). Les jours de beau temps, la terrasse du MAD Café ( la photo ci-dessus date de 2009) permet aux promeneurs de se désaltérer ou de se restaurer. Diverses activités sont organisées dans ce cadre arboré, et le kiosque voisin accueille à nouveau des concerts, notamment lors des fêtes de la Musique ou du 21 juillet (fête nationale).
Il existe un projet de rénovation et d’extension du MAD, dû à l’Atelier d’Architecture Beguin-Massart. On le prétend possible pour 2015 :
18:08 Écrit par Claude WARZÉE dans Blonden, Avroy, Rogier, Terrasses | Tags : histoire de liège, parc avroy, avroy, avenue rogier, trink-hall | Commentaires (6) | Facebook |